Troisième jour de tournage. Nous rebondissons sur les commentaires que vous nous avez laissés sur Talaat Pacha, un des principaux responsables du massacre des Arméniens. La question était posée de savoir si sa tombe (ou son mausolée) existait bien à Istanbul et comment elle était mise en valeur. Nous avons souhaité en parler avec un universitaire turc, Soli Özel, éditorialiste au journal Sabah.
Nous tenons également à vous remercier tous pour la qualité de vos interventions.
Audio uncut de tout l’entretien avec Soli Özel :
Bonjour à tous,
Je ne prendrai connaissance de la vidéo que ce soir. Donc, un simple rappel (peut-être redondant et si c’est le cas n’en tenez pas compte) : Talat Pacha forma avec Enver et Djemal le groupe dit des » Trois Pachas » qui dirigea le gouvernement ottoman de 1913 à 1918. Talat Pacha le dirigea d’abord en tant que ministre de l’intérieur puis en tant que grand vizir. Principal responsable du génocide, il fut assassiné en Allemagne où il s’était réfugié après la 1ère guerre mondiale avant que ses cendres ne soient rendues par Hitler en 1943 à la Turquie où il jouirait d’un statut de héros national.
Une polémique porte sur la réalité ou la falsification de ses télégrammes donnant l’ordre du génocide. Qu’en est-il exactement ? Queles sources d’archive sont disponibles en Turquie ? Les a-t-on classées et répertoriées ?
Bonjour à vous tous,
Merci encore Tristan et Alban, les rendez-vous qui vous nous donnez sont intéressants. Continuez !
Le reportage d’aujourd’hui est intéressant. Je trouve que monsieur Soli Ozel a exprimé ce que les Turcs pensent, au fond d’eux mêmes, du boucher sanguinaire et sans âme qu’a été Talaat. Malheureusement ceux qui connaîssent la personnalité du triumvirat Jeune-turc (Talaat, Enver, Kemal) ne parlent pas assez, n’explique pas. Ont-ils peur des représailles du gouvernement ou des extrêmistes ? En tout cas votre reportage a le mérite de le monter. Bravo.
Quant à ce qu’il dit (et Dink le disait aussi) sur le fait que parler du génocide arménien, faire des « pressions », vouloir à tout prix une loi puinissant le négationnisme, est néfaste et déssert l’éducation du peuple turc. Je ne suis pas du tout d’accord.
La lutte, l’éducation qui se fait au sein de la Turquie concerne la Turquie, le reste du monde ne peut pas attendre que les choses évoluent là bas pour passer à l’étape suivante.
Je poserai mon interrogation différemment, ne pensent-ils pas que le fait que toutes ces questions soient débattues à l’extérieur, le fait que l’opinion mondiale ait pris connaissance de tout ça, ne pensent-ils pas que cela donne pas un peu plus de liberté aux intellectuels Turcs pour parler plus et avancer ?
Je m’explique. Quand la liberté d’opinion en Turquie déplaît au gouvernement, ce dernier sait museler d’une façon radicale le « fautif ». Mais lorsque l’opinion publique internationnale est au courant et suit le cheminement de ces intellectuels Turcs, alors là le gouvernement hésite avant d’adopter une attitude radicale. Cela permet à l’intellectuel d’avoir plus d’espace et d’oser aller plus loin.
Il y a aussi, malheureusement, une complicité cachée qui mène au meurtre, monsieur Soli Ozel le dit très bien. On laisse l’irréparable être fait par les fanatiques et on ne voit même pas de démission de la part du ministre de l’intérieur ni du ministre de la justice pour avoir manqué à leur devoir de protection. Alors que tous étaient conscients du danger.
Erratum : il faut lire Djemal et non Kemal
Par opposition aux précédentes interviews, ce maître de conférences éditorialiste au journal Sabah (libéral, dis les mots qui dérangent. Tout le monde les avaient sur les lèvres quant à la responsabilité de l’État dans la mort de Hrant Dink. Il les a prononcé. C’est ce type d’homme qui peut faire véritablement avancer la société turque en l’aidant à évacuer ses vieux démons.
Tristan, on t’as surpris en flagrant délit de précautions oratoires ;-) No problem, mais on sent que tu es dans bain maintenant :)
Si vous pouviez organiser un mini débat à trois personnes, pendant 6 minutes, à la lumière de vos connaissances actuelles sur la question arméniennee, ce serait intéressant. En ciblant 2 à 3 questions clés, ça devrait le faire. Un thème par exemple : Comment expliquez-vous que le gouvernement (Gül, Erdogan) nie fermement la réalité du génocide arménien tout en appelant au débat des historiens en acceptant par avance ses conclusions ? N’y a t-il pas là une contradiction flagrante ? (sous-jacent: où est l’erreur…).
Bonne route et n’oubliez pas de goûter les fameux Dolmas (feuilles de vigne farcies, chaudes). Hummmmm…
Que grâce vous soit rendu pour la qualité de ces reportages et la pertinence des questions posées.
Peut-être deux interrogations à la faveur des prochaines interviews :
1 – Que penser de la lettre adressée au Premier Ministre turc, par l’Association Internationale des Historiens des Génocides :
Texte original à cette page :
http://www.imprescriptible.info/israel-charny.pdf
version française :
http://www.imprescriptible.info/historiens.htm
2 – Si la justification du Golgotha des Arméniens est la guerre et la collusion avec l’ennemi russe, comment expliquer que les Assyro-Chaldéens aient subi le même sort ; comment expliquer également et surtout, les massacres hamidiens de 1894 à 1896 et les massacres de Cilicie en 1909.
Bonjour,
Je tiens à souligner que ce que dit ce pr, tous les éditorialistes turcs l’ont dit notamment ses propos concernant H. Dink. S’il y a un regain en faveur de Talat Pasa en Turquie, c’est aussi à cause du gvt actuel dont certains membres sont ouvertement hostiles à l’héritage d’Atatürk et qui sont qq part nostaligiques de l’empire ottoman.
Concernant les télégrammes de Talat Pasa qui aurait donné l’ordre d’exterminer les Arméniens, il a été admis lors du procès de l’asssasin de Talat Pasa que ces télégrammes étaient des faux.
« Comment expliquez-vous que le gouvernement (Gül, Erdogan) nie fermement la réalité du génocide arménien tout en appelant au débat des historiens en acceptant par avance ses conclusions ? N’y a t-il pas là une contradiction flagrante ? (sous-jacent: où est l’erreur… »
Et bien on peut aussi se demander pkoi les Arméniens ne répondent pas favorablement à la proposition du Premier Ministre Erdogan de créer une commission mixte d’historiens indépendants. Puisque la communauté des historiens soutient la réalité du génocide, pkoi refusez-vous l’arbitrage d’une telle commission ? Normalement, une telle commission devrait valider les thèses arméniennes puisque d’après vous la réalité du génocide et la responsabilité du gvt ottoman ne font aucun doute.
Pkoi contentez-vous de reconnaissances politiques ?
Merci pour ce reportage: on passe du témoignage à l’analyse – d’un homme de la société civile turque – et la « question arménienne » semble prendre une dimension sociétale réelle et profonde.
Juste pour la petite histoire: le parc où se trouve le mausolée de Talaat s’appelle « la colline des martyrs » (!) (beau pied de nez, non?)
…ça montre surtout que la valorisation de Talaat ne date pas d’hier!
Il est faux de dire que c’est le gouvernement actuel qui est responsable du regain de tension, puisqu’il est de loin le plus ouvert depuis le début du kémalisme (bien sûr, « ouvert » est un mot à mettre dans une grande relativité).
Mais la responsabilité de l’Etat (et non gouvernement seulement) est prouvée dans la mort de Dink: il y a d’ailleurs eu des démissions de préfets…
Ce qui est bien dans cette interview, c’est que l’homme parle sans chercher de justifications, de mises en parallèles bizzares avec les « arméniens fautifs », ou de minimisation. Il dit les choses, point. Et il parle du contexte actuel en tant que partie prenante. C’est un acteur précieux de la société turque et ça se sent.
C’est pourquoi je pense que lui est « progressiste » (encore un mot ambiguë), et non l’universitaire d’hier (qui relayait l’argumentaire d’Etat).
rectif: je vous conseille d’écouter l’intégralité de l’interview qui est en format mp3 juste en dessous. L’homme est une belle synthèse de l’ambivalence mémoire/crisaption qui gagne les intellectuels « libres » turcs.
J’en avais les larmes aux yeux … « chronique d’une mort annoncée » … il a du courage car il risque d’avoir des ennuis à affirmer que le gouvernement a une grande responsabilité dans l’assassinat de Hrant Dink …
Efffectivement Sevan, il faut bien comprendre que l’Etat et le gouvernement sont deux choses très différentes en Turquie et qu’ils sont en guerre en ce moment…
Dites les blogueurs, vous êtes vous penchés sur le cas de Dogu Perinçek, leader du Isçi Partisi, un ancien Mao devenu ultra-nationaliste et qui a été jugé en Suisse la semaine dernière? Ce serait intéressant de montrer comment ce provocateur extrémiste est soutenu par les libéraux turcs au nom de la liberté d’expression…
Deniz!Encore une fois, permettez-moi de vous adresser une remarque!
L’Arménie a refusé de fonder une commission d’historiens car elle a proposé en échange de cette commission que la Turquie ouvre ses frontières avec l’Arménie, car il n’y a pas de relations diplomatiques entre les deux pays!Alors comment voulez-vous que les deux pays s’entendent s’il n’y a pas de relations diplomatiques?! La Turquie a refusé, mais sur les sites internet turcs, on préfère dire que ce sont les Arméniens, les lâches et cie, qui refusent de voir la vérité et patati et patata..!
Deuxièmement: Pour les obsèques de Hrant Dink, une délégation d’Arménie s’est rendue en Turquie et cette délégation a, à nouveau, proposé à la Turquie de lever son blocus..!
Diversifiez un peu vos sources, ca devient lassant de vous reprendre…!
Si vous cherchez des livres concernant le génocide arménien et très fourni en détails…je vous conseille le livre de Raymond Kevorkian, « Le Génocide Des Arméniens », aux éditions « Odile Jacob, histoire ». Tous vos enseignements en matière de génocide arménien, sont réfutés et clairement expliqués…!
Encore bon courage aux blogtrotters!!
Magnifique reportage !
Je tiens à vous féliciter pour votre courage et efficacité.
Petite remarque; il me semble que pour le procès Perinçek ce soit une organisation suisse qui ait traîné le négationniste en justice.
Je pense qu’il est important de le préciser.
J’apprécie le respect commun qui règne sur ce blog, vous faites un travail très constructif !
Oui ce serait bien que la Turquie ouvre sa frontière avec l’Arménie. D’ailleurs les Turcs y sont favorables. Et comme vous le savez sans doute, l’Etat turc tolère sur son sol entre 10 à 15.000 arméniens clandestins (source l’express – la fracture arménienne)
Concernant, la création d’une commission d’historiens, je vous renvoie aux propos de Kotcharian dans le figaro du 19/02/07 qui visiblement ne voit pas l’intérêt d’une telle commission.
Figaro : Pourquoi l’Arménie refuse-t-elle la proposition turque de créer un comité mixte d’historiens sur la question du génocide ?
Kotcharian : La normalisation des rapports bilatéraux incombe aux gouvernements et non aux historiens. C’est pourquoi nous sommes prêts à établir avec la Turquie des relations diplomatiques sans conditions préalables, à créer une commission intergouvernementale et à discuter de toutes les questions, y compris les plus sensibles. Sur le continent européen, plusieurs pays ont des différends historiques ou territoriaux. Ceci ne les empêche pas d’avoir des frontières ouvertes, des relations normales, et de discuter parallèlement des problèmes existants. La vraie question est la suivante : pourquoi les autorités d’Ankara refusent-elles l’idée de la création d’une commission intergouvernementale pour trouver des solutions à tous les problèmes bilatéraux ?
Bonjour,
Ce reportage est vraiment très intéressant, bravo.
Le malaise en Turquie est perceptible chez cet interlocuteur qui n’a aucun moment n’a employé le terme de génocide pour son jugement personnel. Pour autant il ne rentre pas dans le nationalisme exacerbé et reconnaît que Talaat et Enver sont responsables de « beaucoup de choses » pendant la guerre.
Toutefois, lorsqu’il conteste les effets de la loi pénalisant le négationnisme du Génocide Arménien (à l’instar du négationnisme de la Shoah)sur le débat interne à la Turquie, je pense qu’il faut nuancer ce point de vue. Tout d’abord parce que cette loi est définitivement une question interne, mais là n’est pas la question. Ce professeur dit à juste titre que le débat s’est ouvert depuis quelques années mais dans le même temps déplore l’effet des reconnaissances de par le monde (le même argument est aujourd’hui développé par les opposants de la reconnaissance au Congrès américain). Toutefois il y a une véritable simultanéité entre le mouvement de reconnaissance fortement initié par la France en 2001 et suivit en Europe et au delà, et l’ouverture du débat en Turquie. Plus de 90 ans après, alors que le mensonge d’Etat régné en Turquie mais également dans le monde, la prise de conscience française et européenne a sans l’ombre d’un doute inspiré le milieu intellectuel turc, qui voyage en Europe. Cette simultanéité ne peut pas être une coïncidence.
Toutefois, là où il a raison, c’est qu’en parrallèle, tel un reflux, les ultranationalistes ainsi que les islamistes, nostalgique de l’époque de l’Empire Ottoman (comme le dis le professeur), opposés sur bien des points s’accordent sur la question du négationnisme et ont intensifié leur pression: les islamistes par l’action gouvernementale (la conférence évoquée dans le reportage avait par avance été annulée sous l’action du Ministre de la Justice turc) et les ultranationalistes par leurs réseaux importants dans la société organisent ce négationnisme et pourchassent les intellectuels.
Mais c’est un effet reflux, qui doit être perçu comme un dernier sursaut, une forme de terrorisme intellectuelle en vue de terroriser ceux qui parlent du Génocide mais également les Etats du monde qui veulent reconnaître le Génocide. Capituler face à ces pratiques serait une grave erreur. Même si c’est difficile, surtout pour ces professeurs, qui portent en eux malgré tout le germe de la résistance au service de la liberté et de la justice, il faut maintenir le mouvement de reconnaissance. Protéger ces intellectuels est aujourd’hui un travail très important car ils contribuent à l’éducation et à la sensibilisation de leur société.
Je pense qu’il serait intéressant de questionner le Ministre Gül mais surtout, le Ministère de l’Education Nationale au sujet de la circulaire de 2003 imposant l’organisation de concours de dicertation sur le thème de la « lutte contre les soi-disant allégation infondées de génocide ».
Continuer!
Bonjour,
Ce vidéo blog est encore plus dynamique que votre premier sur le Cambodge, continuez sur cette voie !
Envisagez-vous de vous rendre au siège du journal où travaillait Hrant Dink pour rencontrer ses confrères, voir comment ils poursuivent son « combat » ?
Piyaz, il faut reconnaître que vous êtes une personne de dialogue, ce qui n’est malheureusement pas le cas de certains de vos compatriotes dont la violence fait encore peur. Mais, bon…
Concernant cette affaire d’historiens, c’est le serpent qui se mord la queue. Pourquoi voulez-vous que les arméniens se penchent sur un fait avéré. Accepter serait douter. Or il n’y a aucun doute, les documents foisonnent de toute part. Dans un message précédent quelqu’un a dit un génocide est l’élimnation totale d’une population ou quelque chose d’approchant. Pas du tout, il s’agit de la planification des faits et non du nombre. Mainetenant je vous invite à lire ce que dit Bernard Henri Levy à ce même propos et sans commentaire.
On dit : « Ce n’est pas à la loi d’écrire l’Histoire »… Absurde. Car l’Histoire est déjà écrite. Que les Arméniens aient été victimes, au sens précis du terme, d’une tentative de génocide, c’est-à-dire d’une entreprise planifiée d’annihilation, Churchill l’a dit. Jaurès l’a crié. Péguy, au moment même où il s’engage pour Dreyfus, parle de ce commencement de génocide comme du « plus grand massacre du siècle ». Les Turcs eux-mêmes l’admettent. Oui, c’est une chose que l’on ne sait pas assez : dès 1918, Mustapha Kemal reconnaît les tueries perpétrées par le gouvernement jeune-turc ; des cours martiales sont instituées ; elles prononcent des centaines de sentences de mort. Et je ne parle pas des historiens ni des théoriciens du génocide, je ne parle pas des chercheurs, de Yad Vachem, ni de Yehuda Bauer, ni de Raoul Hilberg, je ne parle pas de tous ces savants pour qui, à l’exception de Bernard Lewis, la question de savoir s’il y a eu, ou non, génocide ne s’est jamais posée et ne se pose pas. […] (Le Monde 1er Février 2007) »
Ca y est, j’ai visionné la vidéo. Très intéressant et finalement mes remarques étaient bien redondantes, ce dont je m’excuse auprès de Tristan et Alban. Plusieurs questions mériteraient donc d’être approfondies. Si les télégrammes attribués à Talat sont bien des faux (cf. tribunal de Berlin), quelles preuves écrites a-t-on de son implication directe dans la programmation du génocide ?
L’Etat arménien actuel n’étant pas le lieu où a eu lieu le génocide, la commission mixte d’historiens turco-arméniens sous l’égide d’Ankara ne semble pas qualifiée pour confronter des preuves. Pourquoi ne pas donner son accord à une commission de spécialistes internationalement reconnus placée sous mandat de l’ONU (et non de la Turquie)avec un mandat clair de recherche et d’analyse des documents ?
Une rencontre avec le journal Agos serait en effet une bonne idée…
Ignace,
Je me permets, à mon tour, de vous adresser un certain nombre de remarques et, contrairement à mes habitudes, de vous « reprendre ».
1. Sur les relations diplomatiques :
Quand il y a environ 15 ans l’Arménie a déclaré son indépendance, ce nouvel Etat a été immédiatement reconnu par la Turquie. D’ailleurs, à l’époque la presse annonçait que la Turquie envisageait d’établir rapidement des relations diplomatiques avec l’Arménie. A cette même époque le génocide arménien n’était pas à l’ordre du jour « prioritaire » de la communauté internationale, ni de l’Assemblée nationale française. Donc, il n’existe aucune un lien direct de causalité entre le débat concernant le génocide et l’absence de relations diplomatiques entre les deux pays. La France reconnaît publiquement par un texte de loi le génocide arménien et pourtant il existe des relations diplomatiques entre la France et la Turquie.
On peut trouver sur le site Internet du MAE français les informations suivantes : Les Arméniens occupent entre 15 et 20 % du territoire de l’Azerbaïdjan (le Haut-Karabagh proprement dit et les districts azerbaïdjanais environnants considérés comme un « glacis protecteur »). Bakou a accueilli, depuis 1992, entre 500 000 et 800 000 réfugiés et personnes déplacées. 800 000 réfugiés et personnes déplacées, c’est comme au Darfour, voire pire, mais on en parle pas…
Dans le bloc constitutionnel arménien, les départements orientaux de la Turquie sont qualifiés d’Arménie « occidentale ». C’est comme si la loi fondamentale allemande désignait l’Alsace comme une région germanique.
Par conséquent les problèmes diplomatiques turco-arméniens ou arméno-turcs résultent du conflit du Haut Karabagh (solidarité entre les deux Républiques turcophones) et du non respect par l’Arménie des frontières actuelles de la Turquie.
2. Sur la Commission d’historiens :
Eu égard à vos conseils de lecture, à l’unanimité, semble-t-il, des historiens et à l’évidence des preuves, on aurait pu attendre de l’Arménie de faire une telle proposition ou de saisir la justice internationale pour définitivement tordre le coup aux contrevérités turques. Or, c’est la Turquie qui a demandé aux autorités arméniennes de résoudre le problème par un travail commun et non par des parlements étrangers interposés.
Vous dites : « L’Arménie a refusé de fonder une commission d’historiens car elle a proposé en échange de cette commission que la Turquie ouvre ses frontières avec l’Arménie ». C’est faux. L’Arménie demande l’ouverture des frontières indépendamment de cette Commission. Elle a par contre proposé, toujours selon la presse, une autre structure qui discuterait de l’ensemble des problèmes bilatéraux qui pourrait, entre autres, faciliter l’accès aux archives. D’après la presse turque, il y a toujours des contacts directs entre les diplomates des deux pays. Mais le principe même de l’instauration d’une autorité indépendante pour juridiquement qualifier les évènements de 1915 une bonne fois pour toute n’est pas admise par l’Arménie.
3. Sur le blocus :
Les compagnies aériennes turques et arméniennes organisent plusieurs vols charters par semaine entre Istanbul et Erevan (aux blogtrotters de vérifier sur place). Les citoyens arméniens peuvent obtenir un visa d’entrée à leur arrivée en Turquie dont le tarif équivaut à 10 dollars américains. (Pour les autres pays le visa coûte plus cher). Le nombre des ressortissants de la République d’Arménie travaillant actuellement à Istanbul se situe entre 40 et 50 milles (voir un récent documentaire proposé par Arte – Mais vous avez sûrement déjà envoyé vos lettres de contestation)
Finalement, vous pouvez lire l’article d’Arthur Baghdassarian, Président du parti arménien d’opposition « Etat de Droit / Orinats Yerkir » paru dans le Wall Street Journal Europe du 21 février 2007 : L’article s’intitule L’Arménie, prisonnière de son passé. Vous me direz c’est un traître, vous avez raison.
Vous me dites : Balayez plutôt devant votre porte que venir fouiner chez le voisin..!!! C’est tout le mal que je me permets de vous souhaiter…
Maxence, je pense qu’une telle commission permettrait d’instaurer le dialogue, d’échanger des documents historiques, de travailler en commun sur les archives turques et arméniennes.
Surtout, je pense que ce sera le seul moyen de faire admettre la qualification de génocide, si génocide il y a, aux Turcs. Si pour vous la réalité du génocide est un fait avéré ce n’est pas le cas pour les Turcs. Dans l’interview proposé par les blogTrotters, le Pr Sali Ozel avoue qu’avant 1974, il ne connaissait rien des revendications arméniennes. Il dit aussi une chose importante, c’est que les manuels scolaires ne parlent pas des événements de 1915 autrement que comme des massacres réciproques.
Qu’est ce qui importe ? Les reconnaissances politiques ou bien l’instauration d’un dialogue ?
Jules BOYADJIAN pense que ce sont les reconnaissances internationales qui ont permis que s’ouvre le débat sur les événements de 1915 en Turquie. Je n’y crois pas du tout. S’il y a une évolution, c’est parce que la Turquie a bcp changé ces dernières années notamment grâce aux réformes démocratiques entreprises par ce gvt. C’est parce qu’il y a plus de démocratie en Turquie que ce débat est possible.
Oui Atatürk a immédiatement reconnu les massacres et leurs auteurs ont été jugés.
deniz et Piyaz, j’abonde dans votre sens. Je pense qu’il faut prendre Erdogan au mot : oui pour un travail historique sur les évènements en arménie turque de 1915/1920. Oui à une commission indépendante sous l’égide de l’ONU et non à une entente turco-arménienne de circonstance purement diplomatique et non historique.
Re-,
Bien évidemment, les blogguers n’auront pas manqué de démasqué la sémentique de ceux qui défendent, la position diplomatique du gouvernement turc, concernant la Question Arménienne. Ce n’est pas grave.
Il est par ailleurs assez grottesque de comparer le Haut-Kharabagh à la situation au Darfour. A ce sujet je voudrais simplement reprendre les propos d’André Sakharov, Prix Nobel de la Pais en 1975 et qui déclarait dans le Monde du 30 septembre 1989 (c’est à dire au coeur de la guerre qui dura de 1988-1992) « Ce n’est pas un problème entre deux Républiques, c’est un problème d’autodétermination de la population du Haut-Karabakh (ndlr les Arméniens historiquement présent à une hauteur de 80% dans la région qui avait été attribuée arbitrairement à l’Azerbaïdjan par Staline). Le reste n’est qu’intrigues politiques et provocations. » Effectivement, il y a eu un cessez le feu en 1994, une guerre gagnée par les Arméniens qui avaient été lancées de manière défensive à la suite des Pogroms de Sumagaït notamment. Mais à ce sujet, parce que ce n’est pas le sujet du reportage je vous envoie à un lien [http://www.norseroundvalence.com/karabakh%20explications.php] .
L’ouverture de la Turquie pose débat. Le courage des intellectuels est certains. Toutefois et je vous renvoie au rapport du Département d’Etat américain (on ne pourra pas m’accuser de parti pris lorsqu’on sait les relations fortes entre la Turquie et les Etats-Unis qui ont justement poussé Arthur Baghdassaryan à effectuer cet article dans le Wall Street Journal afin d’obtenir la sympathie des américains). Le rapport de 2006 juste publié la semaine dernière, au delà deposer problème sur les questions de tortures (ce n’est là encore pas le sujet) révèle les problèmes de l’indépendance de la justice vis à vis du gouvernement (expliquant les procédures sur le très controversé article 301) et bien évidemment les questions de la liberté d’expression. La terreur que subisse les intellectuels, et c’est ce qu’il y a de plus important quant à la résolution de la question arménienne, qui ne peut passer que par les intellectuels (pour de nombreuses régions mais avant tout parce qu’ils voyagent), est palpable. Par exemple Orhan Pamuk n’est pas rentré à Berlin se sentant plus en sécurité aux Etats-Unis. A ce sujet je vous renvoie sur ce très intéressant article du LA Times (là encore pas de parti pris!) [http://www.latimes.com/news/nationworld/world/la-fg-turkwriters1mar01,1,5274369.story] qui dévoile fondamentalement cette peur.
S’agissant de la commission d’Historiens. Une commission bilatérale arméno-turque évidemment! Evidemment je dis, parce que l’on sombre ainsi dans le plus grand piège diplomatique. L’objectif de cette commission est claire: limiter le Génocide arménien à une question bilatérale entre la Turquie et l’Arménie, en vue d’exclure les observateurs internationaux, et de faire oublier la question dans un débat où les historiens négationnistes envoyés par la Turquie feraient preuve d’une mauvaise foi totale. J’explique mon point de vue sur l’honnêteté de cette proposition du gouvernement turc. Le 4 octobre 2006 dans le cadre d’une conférence du TÜSIAD, à Paris, le Ministère des Affaires Etrangères, M. Tüzmen, questionné sur ce problème, a martelé trois fois de suite dans une grande colère « il n’y a pas de génocide arménien » et de continuer « nous allons investir considérablement pour résoudre selon notre volonté ce problème dans le cadre de l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne ». Le message est clair et ne peut souffrir d’aucun doute. L’objectif est de maintenir le mensonge sur le Génocide arménien de 1915. En ce sens on peut définitivement douter de la bonne foi du gouvernement turc au travers de sa proposition.
Je suis d’ailleurs profondemment sensible au fait que les personnes qui développent ces arguments sur ce blog aient des noms à consonnance turque. Peut-être me trompe-je et ce n’est qu’un pseudo, mais dans le cas contraire, c’est triste d’observer que les turcs exilés ne voient pas l’intérêt de la lutte pour la vérité, car c’est avant tout l’enjeu qui pourrait entraîner la liberation de la société turc d’un mensonge d’Etat qui dure depuis plus de 90 ans maintenant, car ne l’oublions pas, la société turque est également une victime du négationnisme, car elle ne peut pas regarder sereinement son histoire.
Cordialement.
Bonjour, je me permet d’intervenir, car à la vue de vos commentaires, je me pose une question.
Ignace, vous relatez le fait que la Turquie et l’Arménie n’entretiennent plus de relations diplomatiques. Cela est tout à fait juste en effet, de même, en ce qui concerne la fermeture des frontieres entre les deux pays.
Vous semblez par contre, et c’est malheureusement le cas dans les nombreux forums ou blogs ou l’on souhaite aborder la vie politique turque ou le débat sur le génocide arménien, ommetre certaines réalités que deniz a rappeleé précédemment (Probleme du Haut-Karabagh notamment: voir d’aileurs à ce sujet un article du courrier international paru il y a une ou deux semaines).
je me demande donc pourquoi ces informations, nouvent , sont « omises » par certains intervenants pro-arméniens ? Est ce un « oubli »?, une « méconnaissance »?
Pour ma part et pour en revenir à la vidéo du jour, je pense également que le débat en Turquie sur le génocide arménien va progresser dans les prochaines années. laissons le temps au temps, c’est un sujet propre à la Turquie et à l’Arménie. Je ne pense pas que l’nterventionisme de certains pays ,comme la France, par la mise en place de lois mémorielles, ne soit un coup de pouce à l’avancéee des débats.
La réconcilliation entre les deux peuples passe par le dialogue et des efforts à fournir en ce sens par les deux parties. La communauté internationale ne devrait -elle pas plutôt oeuvrer dans ce sens ?
Je le souhaite en tout cas.
Merci aux deux voyageurs pour la qualité de leurs reportages :) J’ai découvert certains coins d’Istanbul que je ne connaissais pas encore à travers vos images :)
À tous> Nous lisons avec intérêt vos échanges et nous tenons encore une fois à vous remercier pour la qualité de la discussion et le respect mutuel qui s’en dégage. Nous avons essayé de contacter plusieurs Arméniens d’Istanbul, mais pour le moment, et c’est tout à fait compréhensible, ils sont plutôt réticents à l’idée de parler face caméra. Si vous avez des suggestions, n’hésitez pas à nous en faire part par email.
Il s’agira d’une commission mixte d’historiens : turcs, arméniens et internationaux. Cette commission sera placée sous l’égide l’ONU. C’est la proposition du Premier Ministre Erdogan.
En faisant cette proposition la Turquie fait un pas pour faire face à son histoire. Les dirigeants turcs ont pris l’engagement d’accepter les conclusions de cette commission.
La reconnaissance sera soit scientifique (commission d’historiens), soit juridique (cour internationale) mais pas politique.
Suggestions : demander à un historien turc de traduire pour nous une page de manuel scolaire traitant du « soit-disant » génocide et d’expliquer : quelles sont les directives ministérielles pour l’enseignement de la question, quelles sont les sources utilisées par les auteurs pour la relation des faits, quelles sont les critiques des sources effectuées par les historiens. Interroger un ecclésiastique arménien sur sa perception de la liberté religieuse en Turquie et sur l’évolution cultuelle et communautaire depuis un siècle.Interroger un juriste sur la rédaction du nouveau code pénal turc : points qui ont fait l’objet de débat, introduction des articles 301 à 305 (amendements ou pas), etc.
A Piyaz : la démarche historique peut très bien être dissociée de la démarche juridique. Ainsi, le travail de recherche d’une commission internationale de spécialistes n’empêche pas la rédaction de textes pénalisant la négation du génocide arménien tant que celle-ci n’a pas été prouvée par ladîte commission.
Le Président Kotcharian a bien évidemment raison de refuser la crétion d’une telle commission, pour plusieurs raisons :
– Quand il s’agit d’un crime, peut-on renvoyer dos-à-dos le criminel et sa victime. Il faut une instance qui tranche et qui éventuellement punie.
– Le génocide arménien est mondialement reconnu par des milliers de preuves et de témoignages, de recherches…Il a été reconnu par le Tribunal des peuples, l’ONU….de nombreux Etats. Raphael Lemkin le créateur du mot génocide se sert du cas arménien comme d’un exemple.
– Ce serait vraiment une belle opportunité pour le gouvernement turc pour dire au reste du monde, et notamment à l’Europe : »ne vous mêlez pas de cela, une commission est en train d’étudier le doosier ».
Pour répondre à Deniz, Je ne pense pas que le gouvernement arménien serait contre un procès international qui jugerai les faits historiques. Je pense plutôt que ce serait La Turquie qui risquerait gros dans une telle procèdure. Pourtant, ce serait la logique.
COncernant le blocus de l’Arménie, je ne vous comprend pas Deniz, contestez-vous que la Turquie exerce un blocus sur l’Arménie ? Vous devriez vous rendre sur place et vous verrez qu’il n’y a aucunes voitures qui passent. Concernant les clandestins arméniens en Turquie, c’est sûrement vrai mais quel rapport dans les relations entre les deux pays ?
Le blocus existe et on comprend bien que c’est un acte de solidarité avec l’Azerbäîdjan.
Concernant le Haut-Karabagh, vous parlez des 500 000 réfugies arméniens ou azéris ? Pour le paralléle avec le Darfour, il ne faudrait pas oublier les pogroms anti-arménien de Bakou en 1988. J’admet une atrocité du coté arménien, c’est les massacres de Khodjalou. Jamais les arméniens aurait dû faire cela. D’ailleurs les responsables de ce massacre doivent être puni.
Pour ce qui est du passé, c’est vrai que les arméniens sont prisooniers du passé. Je pense tous les jours aux récits de ma grand-mère qui est originaire de Yozghat ( très loin de l’Arménie historique ) et a été empoisonné par sa mère pour échapper à la souffrance et qui a vu sa grand-mère être décapité sous ses yeus par un soldat turc. Je pense aussi à mon autre grand-mère dont toute la famille a été brulée vif dans une eglise arménienne de Dyabâkir. Comment voulez-vous oublier un tel passé, il nous hante tous les jours…La douleur a été telle que l’onde de choc se transmet de génération en génération.
Pourtant aujourd’hui, les arméniens pensent qu’il faut construire l’avenir avec leurs voisins turcs, qui malheureusement continuent dans une logique destructrice sans se remettre en question. C’est cela la reconnaissance du génocide, une remise en question et les bases pour reconstruire la confiance entre les deux peuples.
Bravo aux blogtrotters. Bravo aux arméniens et aux turcs présents.
autre suggestion : interroger des arméniens de Turquie le dos à la caméra pour leur permettre de s’exprimer librement.
Bonsoir,
Merci pour votre travail. Je serais interessé maintenant par :
– l’interview d’Halil Bertay de l’université d’istanbul de Bilgi car c’est l’un des malheureusement rare à parler ouvertement du génocide arménien et ses analyses sur le néonationalisme en turquie sont des vrais bijoux.
(il parle français)
– l’interview de ragip zarakoglu un éditeur turc d’istanbul (éditions belge)qui avec sa femme (malheureusement décédée) furent les premiers à publier des livres sur le génocide arménien et aujourd’hui Ragip a 7 procès à son encontre. De mémoire sa maison d’édition a fait l’objet d’un attentat.
– l’interview de Baskin Oran qui il y a 2 ans a publié un rapport sur les minorités en turquie à la demande du Gmt turc. Il parle français et lui ne reconnait pas le génocide mais fut un grand ami de hrant dink. Il a fait l’objet d’un procès car il remettait en cause la notion de turc ( citoyenneté et nationalité). Il vit à istanbul sous protection policière. On l’insulte en le traitant d’arménien ce qu’il n’est pas.
– Pourriez vous nous faire un reportage sur Agos après la mort de Hrant Dink? Que devient son journal?
– Interroger un prof français de lu lycée Notre Dame de Sion sur le nationalisme serait interessant surtout à propos de la question de l’enseignement de l’histoire aux élèves.
J’ai toujours l’impression que vos interlocuteurs sont mal à l’aise face à la caméra. Ils semblent avoir peur. Est-ce le cas ?
Sur la commission regarder l’affaire Sarafian / Halacoglu de ces derniers jours
pourquoi après avoir invité l’historien arménien de londres Yusuf halacoglu président de l’institut d’histoire turc officine créer en 1932 par Ataturk pour turquiciser l’histoire de l’anatolie ce dernier indique désormais qu’il refuse de lui ouvrir les archives ottomanes???
Ce sont les turcs qui ont peur d’ouvrir leurs archives pas les arméniens et ce d’autant plus que les arméniens étaient sujets ottomans en 1915 et donc quand la turquie demande à l’arménie d’ouvrir ses archives ce n’est qu’une manipulation.
Rappeller vous le scandale il y a quelques mois du cadastre ottoman dont le MGK ( conseil sécurité national turc) a refusé l’accès aux chercheurs.
La presse turque comme le Turkish Daily news parle d’halacoglu et du cadastre turc.
Les archives arméniennes ne sont pas ouvertes à la recherche historique. Pkoi ce serait de la manipulation que de demander à l’Arménie d’ouvrir ses archives ?
Quant à l’affaire Sarafyan, c’est Sarafyan qui a décidé d’interrompre la collaboration avec l’historien turc Halaçoglu quand il a su que les archives turques ne comportaient aucune liste nominative des arméniens qui ont été déportés de Harput.
Sarafyan est très courageux mais je pense qu’il était sous la pression de la diaspora arménienne et qu’il a utilisé la 1ère occasion pour arrêter cette collaboration qui n’est pas souhaitée par les Arméniens.
La question est pkoi ?
Quid de l’influence de la diaspora arménienne ? Pensez vous que la diaspora arménienne a une opinion concernant la Turquie, notamment la reconnaissance immédiate du génocide, différente de celle percue par les arméniens d’Arménie ? J’ai un peu l’impression qu’on entend plus souvent des arméniens « exilés » que des arméniens d’Arménie s’exprimer.
Contrairement a ce que dit Piyaz la commission proposée par Erdogan ne serait pas placée sous l’égide de l’ONU. On peut présumer le résultat d’une telle commission.
L’ouverture de la frontière arménienne serait un beau geste de la Turquie. Il me semble difficile d’argumenter que la Turquie est justifier à garder cette frontière fermée en raison du Nagorno Karabagh alors que la Grèce maintient des bonnes relations avec la Turquie en dépit de l’occupation Turque du Chypre du Nord.
Pour répondre à Sidvicious, d’après une enquête réalisée en aout 2006 auprès 1200 personnes représentatives de la société arménienne, seuls 3% des Arméniens se disent concernés par la reconnaissance du génocide arménien dans des pays tiers.
Sondage effectué par l’Institut Gallup en partenariat avec l’Association Arménienne de Sociologie, et commandé par l’Institut républicain international (IRI) avec le soutien financier de l’Agence américaine pour le développement international (USAID).
Sidvicious, je suis peut-être mal placé pour vous répondre mais voici ce que j’en pense : la « diaspora » arménienne regroupe en fait des descendants de rescapés du génocide (400 000 en France ce n’est pas rien). Ils sont donc en premier lieu concernés par le problème et le moindre respect que nous leur devons c’est de les écouter, turcs compris. Les arméniens de l’intérieur (50 à 60 000) ne sont pas tous descendants de rescapés du génocide en particulier si leurs ancêtres vivaient déjà à Istanbul puisque le génocide a eu lieu à l’est et au centre du pays, mais dans tous les cas leur parole n’est pas vraiment libre vu les difficultés à vivre avec leurs voisins comme en témoigne la première interviewée (voire aussi la difficulté dont fait état Tristan a obtenir une interview de leur part).
piyaz, vous n’êtes pas boncuk dans une autre vie ?
woaw
mais moi je ne vois pas qui vous êtes p’tit loup
Les Arméniens de diaspora ont une chance. Ils ne subissent pas le bloccus étouffant conjointement mené par l’Azerbaïdjan et la Turquie. Ils pourraient capituler. Ils ne le font pas. Leur résistance même silencieuse est un SOS vibrant partout dans le monde afin d’interpeler la communauté internationale sur le Génocide. Pour preuve les commémorations du Génocide prennent des tournures gigantesques chaque 24 avril en Arménie. Sans aucun doute l’Arménie et les Arméniens qui y habitent son les premiers défenseurs de la Cause Arménienne et de la reconnaissance du Génocide Arménien. Mais là encore, l’objectif est trop tourné sur les seuls Turcs et Arméniens alors qu’il s’agit d’une situation interpellant la communauté internationale, pour qu’elle-même prenne position, car un Génocide porte en lui une dimension humaine supranationale et que le négationnisme perpétue au delà du temps et de l’espace le Génocide.
La reconnaissance ne sera ni stricto-juridique, ni stricto-historique, ni-strico-politique. Elle sera les trois en même temps, et même plus elle doit être humaine et s’inscrire dans la mémoire du monde, car si le devoir de mémoire n’est pas réalisé c’est les générations futures qui risqueraient à nouveau d’être confronté à ce type de crime. Force est de constater que lorsque Hitler frappe les juifs, il bénéficie de l’effet de surprise. Malheureusement la Shoah fut une surprise générale… parce que les enseignements sur le génocide arménien n’ont pas été tiré. Hitler l’avait dit: « Qui se souvient encore du massacre des Arméniens? »
Historique, bien sûr, dans la mesure où le crime a été réalisé dans le passé. Mais comme disait Silvie Goulard, justement à propos du Génocide Arménien « La reconnaissance historique a été faite maintenant il faut la reconnaissance politique ».
Les Historiens ont fait le travail. Bien qu’ils existent des Historiens négationnistes de la Shoah, la reconnaissance du génocide des juifs, est un fait admis de tous, ce qui constitue plus qu’une reconnaissance historique, mais une reconnaissance humaine, qui porte également en elle un aspect juridique, politique, et j’ai envi de rajouté pédagogique.
Juridique, elle le sera évidemment puisque la notion même de génocide est une notion juridique, née des études de Lemkin, qui s’appuyait sur le cas arménien et la découverte de la Shoah. Juridique également, car il s’agit depuis les conventions de 1968 d’un crime imprescriptible, qui appelleront donc une repentance de différente manière.
Politique, c’est un stade important. Par reconnaissance politique j’entends bien sûr, une reconnaissance entraînant le destin national. La reconnaissance politique donne déjà la possibilité aux populations des Etats qui ont reconnu de saisir toute la complexité du Génocide et d’être en état d’alerte face aux possibles perversions du genre humain. C’est en ce sens que la reconnaissance politique doit être réalisée. Des historiens de par le monde ont reconnu le Génocide Arménien, même des Historiens turcs, ce qui a donné au politique la connaissance pour agir. Tel un bon vieil adage développé par Max Werbé dans le Savant et le Politique, que l’on pourrait résumé par le fait que: le scientifique (en l’occurence l’historien) doit apporté sa connaissance au politique qui est investi de pouvoir légal-rationnel (dans les Républiques) pour agir dans l’intérêt général ». C’est ce qui s’est passé dans les Etats ayant reconnu, conscient que l’intérêt national n’était pas celui de l’amnésie artificielle, mais bien au contraire la protection de la mémoire collective.
Voyez-vous, piyaz, c’est par un tic de langage que je vous ai reconnue (pkoi) : sourire…
Les internautes invités à « démasquer la sémantique de ceux qui défendent la position diplomatique du gouvernement turc concernant la question arménienne » pourraient peut-être, par la même occasion, démasquer celle de ceux qui défendent la position diplomatique du gouvernement arménien et du Président Kotcharian.
La comparaison entre le Haut-Karabakh et le Darfour est bien évidemment grotesque, absurde et saugrenue. Tel est le cas, toutefois, s’agissant de la comparaison entre le génocide juif et le génocide dit arménien ; pourtant cela n’empêche pas l’intelligentsia française de rédiger de beaux articles comparatifs.
Concernant le Haut-Karabakh Jules Boyadjian parle « d’une guerre gagnée par les Arméniens qui avait été lancée de manière défensive (!) à la suite des Pogroms de Sumagaït notamment ». La similitude entre le discours dit négationniste des Turcs et celui d’une partie des Arméniens est étonnante. (Donc on peut lancer des guerres défensives en cas de menace imminente et déplacer plus de 500 000 personnes). De même, lorsqu’on affirme que l’ancien Président du Parlement arménien Arthur Baghdassaryan a publié un article dans le Wall Street Journal afin d’obtenir « la sympathie des Américains », on n’est pas très loin des nationalistes turcs qui fustigent l’écrivain Orhan Pamuk, qui a publiquement parlé des victimes arméniennes, au nébuleux motif qu’il ferait partie d’une conspiration anti-turc mondiale.
Les lacunes démocratiques de la Turquie, la condamnation déplorable de Hrant Dink ne justifient pas le système anti-démocratique et le repli de l’Arménie qui vit sous la tutelle russe.
Richard, concernant le Haut-Karabakh, vous dites : « Il ne faudrait pas oublier les pogroms anti-arménien de Bakou en 1988. J’admets une atrocité du coté arménien, c’est les massacres de Khodjalou. Jamais les Arméniens auraient dû faire cela. D’ailleurs les responsables de ce massacre doivent être punis ». Et je suis tout-à-fait d’accord avec vos propos. Mais peut-on parler d’un génocide des Azerbaidjanais ? Je ne le pense pas. Car la volonté, certes pas très louable, des Arméniens n’était pas d’exterminer l’ensemble d’une nation. Et je ne pense pas (il se peut que je me trompe) non plus que la volonté du gouvernement ottoman était d’exterminer les Arméniens, même si en raison de la déportation de nombreux Arméniens, femmes et enfants, ont perdu leur vie et la Turquie une partie de sa richesse et surtout l’amitié d’un peuple talentueux.
Cependant, doit-on oublier les victimes turques et leur douleur. A ce propos Gilles Veinstein disait (la revue Histoire, avril 1995) : « il y eut aussi de très nombreuses victimes parmi les musulmans tout au long de la guerre, du fait des combats mais aussi des actions menées contre eux par des Arméniens, dans un contexte de rivalité ethnique et nationale. S’il y a des victimes oubliées, ce sont bien celles-là, et les Turcs d’aujourd’hui sont en droit de dénoncer la partialité de l’opinion occidentale à cet égard. Est-ce parce qu’il ne s’agissait que de musulmans qu’on les néglige, ou bien parce qu’on estimerait implicitement que le succès final de leurs congénères les prive du statut de martyrs ? Quel regard porterions-nous donc sur les mêmes faits, si les choses avaient tourné autrement, si les Arméniens avaient finalement fondé, sur les décombres ottomanes, un Etat durable en Anatolie ? »
En parlant des responsables arméniens à punir en raison des massacres commis envers les Azerbaidjanais, je cite une autre réflexion de Veinstein (même texte) : « On a ainsi connaissance de 1 397 cas de condamnations d’agents ottomans pour crimes contre les Arméniens, dont des condamnations à mort. Dans la région de Harput en particulier, où de terribles violences contre les Arméniens étaient commises, selon le témoignage du consul américain Leslie A. Davis, avec l’accord du gouverneur qui affirmait agir sur ordre de la capitale, 233 procès en cour martiale furent intentés contre des officiels ottomans accusés de crimes contre les Arméniens, suivis de condamnations. L’historien hollandais Erik Zürcher propose pour sa part une explication à ces apparentes contradictions : s’il est intimement convaincu de l’implication non du gouvernement mais d’un cercle interne au sein du CUP dans l’extermination, il constate néanmoins qu’il est difficile, sinon impossible de le prouver « au-delà de tout doute » »
Finalement, ayant fait une partie de mes études en Turquie, je peux clairement dire que l’on ne m’a jamais inculqué la « haine » anti-arménienne (on a sûrement « adouci » et occulté une partie d’un passé tragique). D’ailleurs, contrairement aux apparences, ni Talat ni ses compagnons ne sont traités comme des héros nationaux pour la simple raison qu’ils sont tenus responsables de la chute de l’Empire.
Gilles Veinstein a été sermonné par ses pairs du collège de France pour avoir pris un parti pris idéologique sur un sujet historique dont il n’était pas spécialiste : dans un article commandé par la revue L’Histoire pour son dossier consacré à la déportation des Arméniens en 1915, paru en avril 1995, Gilles Veinstein a expliqué que bien que n’étant pas spécialiste de cet évènement, il a accepté de participer au dossier de la revue L’Histoire … uniquement à cause du contexte du procès Lewis ».
Le parlement de l’enclave du Haut Karabach avait voté en faveur de s’unir avec l’Arménie et un référendum a eu lieu durant lequel la vaste majorité de la population de la région a voté en faveur de l’indépendance. La demande d’union avec l’Arménie qui s’est développée vers la fin des années 1980s débuta pacifiquement, mais ensuite, avec la désintégration de l’Union soviétique, le mouvement devint un conflit violent entre les deux groupes ethniques, résultant ainsi à des allégations de nettoyage ethnique par les deux camps
Dans cette interview, l’explication de Sali Ozel sur la raison d’être de l’art. 301 du code pénal turc est très intéressante.
Donc d’après Sali Ozel qui repred les propos du ministre de la justice turc, les européens savaient très bien que cet article allait être rédigé et qu’en qq sorte c’était la contrepartie des réformes demandées par l’UE. Si cela est vrai, on peut effectivement se poser des questions sur l’honnêté intellectuelle des dirigeants européens qui demandent aujourd’hui l’abrogation de cet article. Mais comme l’a précisé Sali Ozel, l’hypocrisie fait partie intégrante des relations entre Etats.
Ce qui est reproché à cet article, c’est la mention de « l’outrage à la TURCITE ». La réforme de cet article portera, à mon avis sur la mention de la turcité. On changera l’outrage à la turcité par l' »outrage à la nation » et en définitive, rien n’empêchera de poursuivre les intellectuels dont les propos déplairont aux avocats ultranationalistes et aux procureurs défenseurs zélés de la nation turque.
Le débat est ailleurs.
piyaz, vous faites un procès d’intention aux dirigeants européens : l’ancien code pénal turc était un code liberticide datant de la dictature militaire. Il est évident que le premier pas demandé à la Turquie pour accéder à un état d’Etat démocratique était la réforme de ce code même au prix de quelques survivances d’ancien régime (art. 301 à 305 qui sont toujours liberticides et doivent être abrogés)
Sans atermoyer d’avantage, juste une question à Deniz:
Pour vous, y a-t-il eu un génocide des Arméniens?
Les arguties sont nombreux et la sémantique est très calquée sur celle de la diplomatie de l’Etat Turc: « comparaison entre le génocide juif et le génocide dit arménien », « le discours dit négationniste des Turcs », « je ne pense pas (il se peut que je me trompe) non plus que la volonté du gouvernement ottoman était d’exterminer les Arméniens », « doit-on oublier les victimes turques et leur douleur » puis vous citez le négationniste Gilles Veinstein…
On ne peut resservir à longueur de commentaire, les thèses d’un gouvernement négationniste (avec plus de diplomatie ces derniers mois – on ne dit plus « le génocide est un mensonge » mais « nous en attendons la preuve », alors que celle-ci a été très largement établie) sans cacher ses véritables intentions.
Franchement, Deniz, Vous faites un mélange de toutes les notions. Vous metttez au même niveau guerre, massacre, génocide. C’est très facile de faire cela pour noyer le poisson, mais pourtant il faut être précis sur les termes.
Les azéris ont commis des pogroms à Bakou, aucun arménien ne dit que c’est un génovide. Il n’y a pas la preuve de plannification.
Quant au génocide arménien, il y a des preuves d’une volonté politique de destruction de la population arménienne. Dire le contraire, ce n’est que de la mauvaise foi. Le dialogue dans ces conditions est impossible quand même les faits démontrés ne sont pas acceptés.
Je voulais juste dire qu’il n’y a pas de preuves écrites non plus de la volonté d’Hitler de génocider les Juifs. Néanmoins…
Tout d’abord grand merci pour le superbe boulot que vous faites.
A part celle de l’interview avec l’amie de H.DINK, je n’arrive pas à visualiser les vidéos de la Turquie sur le génocide arménien. Y a-t-il une raison particulière à cela?
En vous souhaitant de formidables reportages du Darfour meurtri.